Amoureuse de Santiago , un bel argentin , Sandra , 32 ans, l’avait épousé pour qu’il ait un titre de séjour et qu’il puisse rester en France. Aujourd’hui elle se demande s’il l’a aimée ou tout simplement manipulée.
J’ai rencontré Santiago il y a trois ans, dans des circonstances assez incongrues. Chez une amie, qui l'avait rencontré sur Meetic. Elle l'avait invité à dîner et je devais passer chez elle prendre des pots de peinture. Elle m'a aussi invitée à dîner (c'était une très bonne amie , presque une soeur). Entre eux ce n’était pas ça, je le sentais bien . A un moment, elle va a la cuisine, il me saute dessus, il m’embrasse. « J’en révais depuis que vous êtes arrivée»me dit-il « Bon . Alors on s ’en va. Tu vas m’aider a porter mes pots de peinture…». Il mesurait un mètre 92 , moi je ne fais pas plus d’ un mêtre 60. Il avait trente-cinq ans, moi trente. Je sortais d'une histoire avec un homme beaucoup plus âgé que moi et qui avait du sang kaki dans les veines, un militaire comme mon père. Je venais d’emménager dans un nouvel appart’. Entre nous, ça a été un vrai flash.
Sa peau caramel. Son odeur, je trouvais qu’il sentait le miel . Sa voix. Son accent de dingue. Tout me plaisait en lui . Lorsque je l'ai rencontré, il était en France depuis sept ans, il était venu avec une bourse pour finir sa thèse de psycho. Moi je suis comédienne mais avant j'avais fait un DESS de psychologie clinique, ça nous rapprochait. Nous sommes tombés amoureux ensemble mais nous n'avons jamais vécu ensemble. A ma demande : l’idée du couple m’a toujours fait flipper. On se voyait presque tous les jours et c’était merveilleux . Il me faisait des cadeaux. C’est lui qui m’a abonnée à ELLE par exemple, il savait que j’aimais. A mon anniversaire, il m’a offert trente petits cadeaux planqués dans tout l’appartement et reliés a un fil. Il fallait que je les cherche. Le dernier était dans sa poche : un simple morceau de papier sur lequel il avait écrit: « c’est moi». C’était génial, comment n’aurais-je pas pu tomber amoureuse d’un type comme lui ? C’était un intello pur sucre , un homme brillant intellectuellement mais pas très mur affectivement, comme s’il n’avait aps grandi . Un vrai artiste (avec tout le tourment qui va avec). Cela dit, dés le départ, je le savais incapable de s’engager. Il en parlait. Il était honnète, dans un sens . Le premier livre qu’il m’a offert, c’est « le syndrome de Peter Pan ». Il me l’a tendu. Il m’a dit : « tiens, voilà le mode d’emploi ! ».
En fait, il n’avait déjà plus le statut d’ étudiant. Il s’était faché avec son directeur de thése et se retrouvait donc sans permis de séjour . Il passait ses journées à faire des photos ou dans les bibliothèques à lire les grands auteurs français. Il adorait Paris qui était pour lui une ville mythique. Et pas question qu’il retourne en Argentine malgré son interdiction de travailler. Alors il faisait des remplacements de gardiennage, la nuit, il était payé au noir. Il gagnait peu et moi j’assurais. Je faisais l’infirmière aussi. Il était dépressif, il prenait du prozac. Un jour la question de ses papiers s’est posée. On était en septembre, en vacances à l’ile de Ré, ça faisait six mois qu’on se connaissait. Il me dit: « mon visa a expiré en juillet, j’ai un problème. Pour que je puisse rester, il faudrait qu’on se marie … » Chose inconcevable pour moi,trop engageante, trop importante. Mes parents étaient mariés depuis 40 ans, ça m’impresionnait trop. Il avait déjà été marié , lui .Avec une fille venue d’ Argentine mais qu’il avait rencontrée ici. Une étudiante qu’il avait quittée au bout de trois mois….
Nous nous sommes pourtant mariés, en février 2005, il y a deux ans. Malgré la désapprobation de mes amies, qui me disaient « Tu es en train de te faire pigeonner ! » Je l’aimais. Je me disais: si je ne vais pas au bout de mon histoire avec lui , je m’en voudrais toute ma vie! J’avais cassé ma tirelire, acheté un pull à paillettes et des talons chez Sonya Rikiel . Lui portait son costume croisé. Je me répétais « je suis sa femme ! » Je trouvais ça romantique . Ca me plaisait.
On n’avait pas d’alliance. On ne vivait pas ensemble mais je me disais: et voilà je suis partie pour faire ma vie avec cet homme là ! Les choses se sont alors gâtés assez vite. Je le voyais moins. Il mettait de la distance. Et puis trois mois après il a eu une aventure qui a duré six mois avant que je m'en aperçoive. C’était comme si ça l’angoissait de rester avec moi. Il FALLAIT qu ’il s’en aille, comme il était parti la première fois qu’il avait été marié. Il ne répondait pas à mes mails, je croyais qu’il était mort. Il est revenu puis ila disparu de nouveau puis revenu . Je lui ai demandé: « mais pourquoi tu me fais ça Santiago ? » « On ne se comprend pas, ça ne va pas bien…. » « Tu me fais vivre un enfer, Santiago Quand tu pars , dis moi au moins où tu vas … ». On n’arrivait plus à se parler mais on faisait encore l’amour, ça c’était aussi fort. Le mariage donne droit à un étranger un titre de séjour pour dix ans mais seulement si ça dure au moins quatre ans. Avant, il faut renouveler ce tître chaque année. En juin, au bout d’un an, il a fallu aller à la préfecture pour le premier renouvellement. Je l’ai attendu, il n’est pas venu. J’’y suis allée seule. J’ai déclaré que nous vivions toujours ensemble. Il n’est rvenu qu’au bout de huit jours . C’est à ce moment-là qu’ il m’a avoué qu’il avait rencontré quelqu’un. Ca a été un effondrement total. Comme s’ il me plantait un couteau dans le dos . Et pourtant ce jour là on a encore fait l’amour. Comme des dingues. Mais le lendemain matin, je lui ai dit : « Maintenant tu choisis. Parce que moi je ne partage pas avec l’autre. »
Je pensais qu’il allait revenir, que j’allais réussir a corriger le tir. Il ne pouvait pas ne plus m’aimer puisque je l’ aimais tellement ! Je pleurais tous les jours. Je ne dormais plus .J’ai recommencé une thérapie. Ma psy m’a dit : « Quand on pleure tous les jours, ce n’est pas de l’amour, Sandra » Combien de fois elle m’a répété ça : « Ce n’est pas de l’amour,Sandra… » Quand je le voyais, je lui disais que je l'aimais encore, que je l'attendais. Il me disait que notre histoire était finie , qu’il ne m’aimait plus. Alors je le menaçais d’entamer une procédure de divorce , ce qui aurait pour conséquence de le renvoyer en Argentine.
J’ai beaucoup hésité. Il ne méritait pas que je continue de l’aimer. Je me demandais surtout jusqu'à quel point lui m’avait utilisée, s’il ne s’etait pas servie de moi, s’il ne m’avait pas manipulée? Mais je ne suis pas quelqu’ un dans la vengeance et j’ai renoncé finalement à demander le divorce . Mes amies me traitent d’idiote. Elles me conseillent de tout faire pour me libérer de son emprise. Moi, je ne crois pas que ce soit la bonne solution. Pour lui évidemment, mais aussi pour moi. Oui, c'est presque un acte militant, comme si je m'engageais avec les réfugiés de Cachan. Il m’a démolie, c’est vrai mais j’aurais du mal à garder du respect pour moi, à me regarder dans la glace , si en commençant la procédure de divorce, je permettais qu’on le renvoie dans son pays. Nous nous sommes vus il y a deux mois. Je le lui ai dit. Je lui ai dit pourquoi. Il m’a embrassée . Il remerciée . « je ne le fais pas pour toi mais pour moi…» Je le regardais déjà différemment, comme si je commencais a être guérie de lui. J’avais tellement pleuré , il m’en avait tellement fait baver, je sentais qu ‘on était là dans la vraie rupture. En partant, il m’a dit: « si tu as besoin de quelquechose, tu m’appelles …» J’avais envie de lui répondre: « c’est ça, casse-toi, tu m’as fait asez de mal comme ça …»
Je suis soulagée de la fin de cette histoire, contente de la décision que j’ai prise, mais aussi en souffrance d’avoir perdue cet homme avec qui j'avais révé passer ma vie. Je l’ai encore revu la semaine dernière. Je lui ai donné les dernières affaires qu’il avait laissées chez moi : des teeshirts, une paire de chaussures. Ses chaussons, encore tout imprégnés de son odeur. Le matin du jour ou il est venu, je suis allée chez le coiffeur et je me suis fait décolorée en blonde. Le lendemain, j’ai arrété de fumer. Comme ça . D’un seul coup. J’en avais assez de ce poison qui me détruisait, lentement mais sûrement.
ELLE . 2007. Propos receuillis par Antoine Silber.
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